Tariffa delle puttane di Venezia |
TARIFFA DELLE PUTTANE
DI VENEZIA*
Nulle part ailleurs autant qu’à Venise, le noir est une couleur.
Ce noir, aux reflets curieusement dorés, qui a fait la renommée de ses aquafortistes.
L’habileté au contraste y est extrême ; et jamais ici utilisée par forfanterie ou pour masquer quelque faiblesse du trait.
L’opposition du clair et de l’obscur naît tout naturellement de la morsure de l’acide, comme de l’attaque du trépan sur le marbre ébauché.
À l’abri de la caresse du chiffon, le flot d’encre, engouffré dans la fissure savante, stagnera, de même qu’aux flancs des statues, l’ombre, créatrice des drapés.
_____
Triste, sinistre, le défilé qui s’annonçait attrayant s’englue dans le tiède et grotesque suintement des orifices. La parade grivoise s’étire, tragique maintenant, en une lente énumération : tant de cadavres parmi tant de vivants …
- Peut-être faudrait-il faire quelque chose ?
_____
Alors ressurgit, magnifique et incomparablement précieuse, du fond ordonné de la mémoire, l’image, seule et pure vérité.
_____
Le catalogue ébahit toujours.
Paul Conte
1995
Tariffa delle Pttane overo ragionamente del Forestiere e del Gentil’huomo :
nel quale si dinote il prezzo e la qualita di
tutte le Cortegiane di Venezia, col nome delle ruffiane.
Stampato nel nostro hemisphero
l’anno 1535
messe di Agosto
*Les uns prêtent la composition du poème à l’Arétin, d’autres l’attribuent au Veniero, d’aucuns proposent leur collaboration; enfin, certains lui confèrent une paternité plus vague, dite “arétinesque”, définissant ainsi un genre littéraire dans lequel la notion d’air du temps n’a pas la moindre part.
|